La Sainte Poterie : exploration urbex dans une usine de céramique.

La Sainte Poterie : exploration urbex dans une usine de céramique.

Pour ce nouveau récit, je vous invite à partir en exploration urbex à mes côtés, dans une ancienne usine de porcelaine et de faïence. Nichée dans une petite commune rurale du Grand-Est, la Sainte Poterie est préservée de toutes dégradations humaines. A l’intérieur, l’ambiance est unique, un site industriel comme il est rare d’en visiter. Le temps s’y est arrêté. Tout est resté figé, rien n’a bougé, comme si les ouvriers allaient revenir le lendemain, reprendre leur activité arrêtée la veille.

Une usine tournée vers les objets religieux

La Sainte Poterie fut fondée en 1856 dans une ancienne ville minière, connue pour ses abondantes et qualitatives carrières d’argile. Au départ, il s’agit d’une porcelainerie produisant exclusivement des sujets religieux, notamment des statues pour les églises et les ornements de tombes. Rapidement, elle se diversifia dans la production de statuettes en terre cuite, pouvant être fabriquées à température plus basse dans la partie haute des fours. La statuette y est alors déclinée sous toutes ses formes, ce qui fait de la Sainte Poterie, l’usine détenant le monopole de l’art funéraire en France.

Les souvenirs de vacances

Vers 1889, à l’occasion de l’Exposition Universelle, la manufacture lance la production d’une série intitulée « souvenirs des bords de mer » en terre cuite rouge ou décorée. La Sainte Poterie se spécialise alors dans ce secteur et innove dans des milliers de modèles différents. Elle devient alors le premier fabricant français de souvenirs locaux. D’ailleurs, en rentrant de cette exploration urbex, en regardant sur Internet, j’ai constaté que ces sujets étaient recherchés par les collectionneurs. Vendu quelques francs dans les années 30, un souvenir de bord de mer peut valoir, aujourd’hui, plus d’un millier d’euros.

Une croissance malgré les deux Guerres Mondiales

A la fin de la Première Guerre Mondiale, la manufacture est rachetée. Elle est reconstruite et s’agrandit pour passer à l’aube de la Seconde Guerre Mondiale, d’une quinzaine d’employés à quatre-vingts. En 1938, l’usine se diversifie et devient une faïencerie. L’argile blanche de haute qualité nécessaire pour réaliser de la faïence était disponible dans les mines de la ville alors que le kaolin nécessaire pour la porcelaine devait être acheminé depuis Limoges. Dans les années 60, la production en terre cuite est arrêtée. Néanmoins, l’usine connaît une activité importante (jusqu’à 180 collaborateurs) et se lance dans les articles publicitaires avec notamment une gamme de cendriers.

Un patron qui ne pourra sauver son industrie

Dans les années 70, le fils du patron reprend seul la direction de l’usine. Il la restructure avec succès et arrive à la maintenir en activité malgré l’augmentation des charges patronales. Mais en 1987, il est frappé d’une maladie éprouvante l’obligeant à fermer les portes l’année d’après et à déposer le bilan en 1994. La manufacture est à nouveau reprise en 1996 mais l’activité ne décolle plus. Pendant une dizaine d’années, l’usine tourne au ralenti avant de mettre la clé sous la porte. Concurrencée par le marché asiatique beaucoup plus compétitif, elle croule rapidement sous les charges sociales et les insuffisances d’actifs.

Retour en 2015 lors de notre exploration

Comme j’ai pu déjà l’expliquer dans d’autres récits de visite de site industriel, il n’est jamais simple d’infiltrer une usine en urbex. Elles sont souvent soit gardiennées, soit dangereuses ou alors complètement dégradées. Celle-ci n’est pas surveillée à l’époque. Néanmoins, pour pouvoir entrer, il faut franchir un portail de plusieurs mètres. Lorsque nous arrivons tous les trois face à l’obstacle et connaissant ma souplesse incertaine, je sais que la tâche ne va pas être simple. Gérald, l’un d’entre nous, propose de nous faire la courte échelle afin de nous aider à basculer de l’autre côté. C’est là qu’on reconnait les vrais amis ! Sans son aide, je n’aurais jamais pu visiter ce lieu. Matthieu et moi arrivons donc à passer de l’autre côté du portail. Gérald aussi mais sans aucune aide (oui, en cette fin d’après-midi, notre pote nous a fait briller les yeux).

Rien n’a bougé depuis des années

La quantité d’objets et d’outils restants m’interpellent immédiatement lorsque nous entrons au sein de la Sainte Poterie. Depuis la fermeture de la manufacture, rien n’a bougé. Tout est resté figé dans le temps. C’est la première fois en urbex que je visite une usine aussi bien conservée. Le site est composé de plusieurs bâtiments. On distingue les dépendances d’un ancien château. Ce sont les hangars les plus anciens. Puis on peut remarquer les différents agrandissements que l’on est venu coller au fil du temps à ces édifices historiquement présents.

La visite se fait dans le calme. A l’extérieur, pas un bruit. Nous sommes arrivés en fin de journée et le rez-de-chaussée est plongé dans l’obscurité. Ce silence contraste avec le bruit qu’il devait y avoir lorsque l’usine tournait à plein régime. Au centre du bâtiment principal, plusieurs fours trônent portes ouvertes. Difficile de se repérer tant la manufacture comporte de nombreux recoins. Dans chaque pièce, une multitude d’étagères permettent l’entreposage de centaines d’objets. Beaucoup pourraient être mis à la vente. D’autres attendent d’être cuits ou vernis. D’un côté, on retrouve les statues religieuses et des santons en terre cuite. D’un autre, de vieux souvenirs avec les inscriptions des villes de Béziers, Mandelieu la Napoule ou encore Costa Brava.

Je vous laisse découvrir à présent la série de mes photographies réalisées lors de cette exploration urbex de cette usine. N’hésitez pas à laisser un commentaire si vous avez apprécié cette visite à mes côtés tout en restant confortablement installé dans votre canapé. Sachez que vous pouvez également découvrir mon interview radio réalisée en mars 2022, sur NRJ Rouen dans le cadre de ma dernière exposition photographique à Rouen.

5 commentaires

Belle découverte que cette ancienne usine qui a la chance de n’avoir pas été pillée… J’aime beaucoup tes images qui figent une époque pas si lointaine.

Bonjour Florent ,

Comme toujours de bien jolis clichés emplis d’émotion , un mélanger de curiosité et regret en découvrant l’histoire de ce lieu .
Nous imaginons très bien les bruits les odeurs rester en suspend ainsi que les nombreux ouvrier admirant leur travail bien fait ,
Merci pour le partage .

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